Syndrome SAPHO et ostéomyélite multifocale chronique récidivante
Plan : 1°) Généralités2°) Clinique3°) Biologie4°) Examens radiologiques5°) Scintigraphie osseuse6°) Critères de diagnostic7°) Associations8°) Bibliographie
L'acronyme SAPHO signifie : Synovite, Acné, Pustulose palmo-plantaire, Hyperostose, Ostéite
Le syndrome SAPHO est un syndrome apparenté aux spondylarthropathies, qui associe à des degrés divers des signes cutanés et des signes ostéo-articulaires.
a) Manifestations cutanées :Les atteintes cutanées précèdent le plus souvent les signes ostéoarticulaires, parfois de plusieurs années.Les lésions cutanées sont plus rarement contemporaines ou apparaissent après les manifestations ostéo-articulaires. Elles se caractérisent par des micro-abcès sous-cutanés en apparence stériles. On décrit essentiellement les acnés sévères comme l'acné conglobata, l'acné ulcérant et fulminans (10 à 18% des SAPHO), la pustulose palmo-plantaire (50% des SAPHO), le psoriasis pustuleux (10% des SAPHO) et l'hydrosadénite suppurée. b) Manifestations ostéo-articulaires :Elles sont périphériques et axiales, multifocales dans 50 % des cas.La distribution des lésions est en fait fonction de l'âge. Chez l'adulte, l'atteinte de la région sterno-costo-claviculaire est la plus fréquente, suivie par le rachis, le bassin, les os longs. Chez l'enfant, l'atteinte se présente comme une ostéomyélite chronique récurrente, multifocale, atteignant essentiellement les os longs des membres inférieurs, plus rarement la clavicule et le rachis.
Selon la topographie des lésions, le patient peut présenter des douleurs osseuses, une tuméfaction des parties molles, une diminution de la mobilité articulaire. 1) Chez l'adulte :- L'atteinte de la paroi thoracique antérieure ou hyperostose sterno-costo-claviculaire est l'un des principaux signes distinctifs des manifestations ostéo-articulaires du SAPHO.Elle se présente sous la forme d'une tuméfaction thoracique antérieure sensible ou franchement douloureuse d'installation progressive. On peut également observer des ostéites costales focalisées qui se traduisent par une tuméfaction souvent douloureuse, localisée en regard d'une des premières côtes. La douleur est calmée par les AINS.
Cette ostéite est en général récidivante localement ou plus généralement sur une autre côte.
- Les articulations sacro-iliaques sont touchées dans 13 à 50% des cas.
- L'atteinte des os longs associe un tableau d'ostéites ou d'ostéo-arthrites aseptiques, le plus souvent multifocales.
- L'atteinte articulaire périphérique est faite d'arthrites périphériques qui sont assez fréquentes (23 à 44% des SAPHO). - Les enthésopathies périphériques sont relativement peu fréquentes, le plus souvent à type de talalgies. 2) Chez l'enfant :Chez l'enfant, l'ostéomyélite multifocale chronique récidivante associe des ostéites et des ostéo-arthrites aseptiques qui touchent principalement les os longs des membres inférieurs, plus rarement la clavicule et le rachis.L'atteinte du bassin et des articulations périphériques est en général absente. Les lésions sont souvent multiples, parfois symétriques. Parfois, il n'existe qu'une seule lésion. L'état général est conservé. Les os atteints sont sensibles, siège d'une tuméfaction avec érythème en regard, parfois associée à un fébricule. L'évolution de ces ostéites est habituellement chronique, évoluant par poussées. c) Autres manifestations :Elles sont rares.Il existe parfois de la fièvre au cours des poussées. Il a été décrit de façon exceptionnelle, une association avec des entérocolopathies inflammatoires chroniques (Crohn, RCUH), une fibrose rétro-péritonéale, une fibrose médiastinale et une thrombose veineuse compressive (veine sous-clavière). Enfin, il peut survenir des fractures pathologiques (clavicule).
Il n'existe pas d'anomalie spécifique.
a) Chez l'adulte :1) Région sterno-costo-claviculaire :Son atteinte est la plus fréquente (60-90% des cas) et la plus caractéristique.
- Les clichés radiographiques montrent une ostéocondensation et une hypertrophie des pièces osseuses, touchant en particulier l'extrémité interne des clavicules, le sternum et parfois les côtes.
- Le scanner permet une étude plus fine et montre : - L'IRM à un stade précoce ou lors des poussées inflammatoires met en évidence une réaction oedémateuse de l'os spongieux et des parties molles adjacentes. 2) Rachis :L'atteinte du rachis concerne 1/3 des patients.Par ordre décroissant les lésions touchent le rachis thoracique, le rachis lombaire, puis le rachis cervical.
- Sur le plan radiologique, on observe trois types de lésions souvent combinées :
- L'IRM met en évidence un hyposignal T1 avec rehaussement après gadolinium et un hypersignal T2. 3) Bassin :L'aspect le plus caractéristique est celui d'une sacro-iliite unilatérale (20-30%), liée à une extension d'une ostéite iliaque adjacente (très étendue).Elle se traduit souvent par des érosions modérées sous-chondrales qui contrastent avec l'intensité et l'étendue de la condensation osseuse qui prédomine sur le versant iliaque. Cet aspect est très évocateur du SAPHO. L'ostéite de l'aile iliaque est un processus condensant qui intéresse l'os en masse ou qui se présente sous la forme d'ostéocondensations en plages. On peut observer également des enthésopathies ossifiantes du bassin et des lésions de la symphyse pubienne avec érosions, condensations et ankyloses. 4) Os longs :L'atteinte des os longs se rencontre chez 30% des patients, surtout dans les régions métaphysaires ou diaphyso-métaphysaires fémorales distales et tibiales proximales.La fibula, l'humérus, le radius, l'ulna peuvent également être touchés. L'aspect est celui d'une ostéomyélite chronique avec une ostéocondensation, un épaississement cortical et trabéculaire, un élargissement de l'os, mais peu de séquestres. L'aspect peut être plus agressif avec notamment une ostéolyse pseudotumorale. Exceptionnellement on observe des appositions périostées. Certains aspects peuvent faire discuter une pathologie tumorale bénigne (ostéome ostéoide), une pathologie tumorale maligne (lymphome osseux primitif, ostéosarcome, ostéosarcome paraostéal) ou des métastases vertébrales ostéocondensantes. 5) Arthrites périphériques :On les retrouve dans 10% des cas.Les arthrites sont rarement destructrices. Elles sont habituellement associées à une atteinte osseuse de contiguïté (évocatrice), mais parfois elles sont isolées. Les localisations les plus fréquentes sont le genou, la hanche et la cheville. Elles touchent parfois les petites articulations de la main ou du pied. Les radiographies conventionnelles montrent une tuméfaction de la synoviale, une raréfaction osseuse, parfois un pincement de l'interligne et des érosions marginales, exceptionnellement une ankylose. 6) Atteinte du crâne et des mandibules :On peut observer une ostéomyélite diffuse et sclérosante de la mandibule (10% des SAPHO), qui peut exceptionnellement s'associer à une atteinte crânienne.Il a été décrit une extension temporale, compliquée d'hypoacousie. Il n'y a pas d'atteinte associée de l'articulation temporo-mandibulaire.
Au total, les clichés radiographiques permettent très souvent le diagnostic lorsqu'ils montrent une condensation osseuse, une hyperostose exubérante, une atteinte érosive ou ankylosante des amphiarthroses. b) Chez l'enfant :1) Os longs :L'atteinte se localise essentiellement aux métaphyses des os longs des membres inférieurs.Elle touche plus particulièrement le tibia, le fémur et la fibula. Les lésions sont habituellement multiples et parfois symétriques. Parfois il n'existe qu'une seule lésion. Au début de l'évolution, on peut observer une ostéolyse métaphysaire, qui est rapidement associée à une ostéocondensation péri et intra-lésionnelle. Il n'y a habituellement pas ou peu d'appositions périostées. On peut observer parfois une tuméfaction des parties molles adjacentes. Il n'y a ni abcès, ni séquestre. 2) Clavicule :On note une ostéolyse de la partie médiane de l'os et des appositions périostées parfois pluri-lamellaires.Avec l'évolution, souvent marquée de poussées et de rémissions, l'ostéocondensation et l'élargissement osseux deviennent évidents. Les autres os de la paroi thoracique antérieure ne sont pas touchés, à la différence des formes de l'adulte. 3) Rachis :On observe un aspect de spondylodiscite ou plus rarement une ostéolyse ou un tassement vertébral.L'atteinte du bassin et les arthrites périphériques ne sont habituellement pas observées chez l'enfant.
a) Protocole :La scintigraphie osseuse corps entier est systématique.Elle doit être précédée d'une acquisition dynamique dans les atteintes périphériques et éventuellement dans les atteintes des sacro-iliaques et du plastron sterno-costo-claviculaire. La TEMP/TDM sera systématiquement utilisée pour préciser les lésions axiales et certaines lésions périphériques (ostéites). b) Chez l'adulte :- L'atteinte du plastron sterno-costo-claviculaire se traduit par des foyers d'hyperfixation multiples au niveau des articulations sterno-claviculaires et sterno-costales, de la manubrio-sternale, des clavicules, des côtes et du sternum (SAPHO1) (SAPHO2a1).Ces foyers d'hyperfixation intense peuvent former le " bullhead sign" qui correspond à l'hyperfixation du manubrium sternal (haut du crâne) et à l'hyperfixation des sterno-claviculaires (cornes). Le "bullhead sign" est un signe typique et donc une manifestation hautement spécifique. Lorsqu'une étude du temps vasculaire est réalisée, on observe également une hyperfixation au temps précoce de la scintigraphie. La TEMP/TDM montre, en regard des foyers d'hyperfixation de la paroi thoracique antérieure, une ostéocondensation intense et homogène des os affectés (ostéite), une prolifération osseuse volontiers exubérante par ossifications ligamentaires avec hypertrophie osseuse (hyperostose), des érosions et parfois une ankylose articulaire (SAPHO2b). Pichler et Coll proposent d'utiliser la tomographie d'émission de positons au 18F-Fluorodéoxyglucose pour détecter une synovite inflammatoire de l'articulation sterno-claviculaire, alors même qu'il n'existe pas d'hypermétabolisme osseux. Selon ces auteurs, cet examen pourrait différencier une ostéite aseptique des ostéomyélites bactériennes ou des lésions malignes des os.
- L'atteinte des articulations sacro-iliaques, souvent unilatérale, peut se présenter sous la forme d'une hyperfixation parfois intense, parfois associée à une hyperfixation intense de l'aile iliaque adjacente en rapport avec une ostéite.
- Au niveau du rachis, on peut observer de multiples hyperfixations souvent intenses des vertèbres qui prédominent sur le rachis thoracique.
- La scintigraphie osseuse détecte les arthrites inflammatoires avant même que les modifications morphologiques ne soient objectivées par les clichés radiographiques, au niveau des petites et des grosses articulations des pieds, des chevilles, des genoux, des hanches, des sacro-iliaques, des épaules.
- Les ostéites, le plus souvent multifocales, se présentent comme des hyperfixations intenses aux trois temps de l'examen, qui touchent préférentiellement les métaphyses et les diaphyses fémorales distales et tibiales proximales et plus rarement la fibula, l'humérus, le radius et l'ulna et parfois la mandibule.
- On objective parfois des enthésopathies (calcanéum) qui se présentent sous la forme de foyers d'hyperfixation au niveau des talons. c) Chez l'enfant :- Au niveau du rachis, les foyers d'hyperfixation peuvent correspondre à une spondylodiscite ou plus rarement à une ostéolyse ou à un tassement vertébral.
- Les ostéites, le plus souvent multifocales, se présentent comme des hyperfixations intenses aux trois temps de l'examen, qui touchent préférentiellement les métaphyses et les diaphyses des os longs des membres inférieurs (fémurs, tibias), plus rarement la clavicule et le rachis. d) Les indications :La scintigraphie osseuse a un rôle important dans l'orientation du diagnostic lorsqu'elle montre des lésions multiples, parfois silencieuses.La mise en évidence d'une hyperfixation franche des zones pathologiques est évocatrice par la localisation des pièces osseuses atteintes. Lorsque le syndrome SAPHO est connu, sa négativité permettrait de conclure à la guérison locale de l'inflammation.
Prise isolément aucune lésion n'est pathognomonique.
Dans les ostéites, la biopsie osseuse est réalisée à visée anatomopathologique et bactériologique en cas de doute.
Elle nécessite une biopsie profonde.
Habituellement, on utilise les critères de Khan pour l'inclusion dans le SAPHO (une seule des trois entrées suffit) :
Une association avec une maladie de Crohn ou une rectocolite hémorragique a été rapportée.
La SAPHO : 20 ans plus tard Rhumatologie Pratique 2006;233:16-18
- Bhosale P, Barron B, Lamki L
- Caravatti M, Wiesli P, Uebelhart D, Germann D, Welzl-Hinterkorner E, Schulthess G
- Chevalier X, Flipo RM, Goupille P, Schaeverbeke T, Sibilia J
- Cotten A, Da Silva J, Guyot-Drouot MH, Flipo RM
- Davies AM, Marino AJ, Evans N, Grimer RJ, Deshmukh N, Mangham DC
- Elgazzar AH
- Freyschmidt J, Sternberg A
- Granier P, Mourad M
- Hayem G, Roux F
- Hoeffel JC, Kopf S, Chateil JF, Mainard L, Chastagner P
- Inoue K, Yamaguchi T, Ozawa H, Okada K, Taki Y, Goto R, Kinomura S, Kaneta T, Fukuda H
- Kahn MF, Hayem G
- Otsuka N, Fukunaga M, Sone T, Nagai K, Tomomitsu T, Yanagimoto S, Muranaka A, Ono S, Morita R
- Paycha P, Ramadan A, Rezgui M, Pouchot J, Aubert F, Levesque M
- Pichler R, Weiglein, Schmekal B, Sfetsos K , Maschek W
- Razzouk M, Cadet G, Carrier P, Vitaux F, Talon P
- Ueno K, Rikimaru S, Kawashima Y, Sakai H
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