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Pathologies extra-osseuses responsables d'anomalies de fixation



Plan :

go1°) Fixations extra-osseuses d'origine artéfactuelle
go2°) Fixations extra-osseuses liées à une pathologie générale
go3°) Bibliographie

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1°) Fixations extra-osseuses d'origine artéfactuelle :

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Un excès de 99mTc libre dans la préparation, le plus souvent en rapport avec un processus d'oxydation lors du marquage, se traduit par une captation intense au niveau de la thyroïde, des glandes salivaires, de l'estomac, des plexus choroïdes, du foie et de la rate.

L'augmentation de la concentration de l'ion aluminium (Al+++) dans l'éluât du générateur ou la prise de certains médicaments, peut entraîner la formation de radiocolloïdes. On note alors une captation dans le foie, la rate et la moelle osseuse.

Lorsque le pH de l'éluât technétié augmente aux alentours de 6,5 (habituellement 4,5 à 5), il peut y avoir formation de nouveaux complexes technétiés (agrégats), qui sont éliminés par la bile et les intestins, ce qui provoque une visualisation de ces structures sur l'examen scintigraphique osseux.

La présence de multiples foyers d'activité focale au niveau des poumons peut également être en rapport avec la formation d'agrégats.

La contamination du patient ou du matériel par du radiotraceur ou par les urines peut être responsable d'une fixation en apparence extra-osseuse.
De même, une injection partiellement paraveineuse est parfois responsable d'une importante activité extra-osseuse.
De plus, un trajet lymphatique et un ganglion lymphatique proximal peuvent être mis en évidence.

2°) Fixations extra-osseuses liées à une pathologie générale :

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a) Pathologies générales diverses :

On peut objectiver une fixation extra-osseuse diffuse dans plusieurs pathologies comme l'hypothyroïdie, l'insuffisance rénale, l'insuffisance cardiaque, les surcharges en fer et chez les patients mal hydratés ou en bas débit systémique.

b) Microcalcifications métastatiques :

Les microcalcifications métastatiques sont responsables d'une hyperfixation diffuse au niveau de l'estomac, du poumon, des reins, du cœur, du foie et à un moindre degré de la peau et des muscles squelettiques.
Ces hyperfixations peuvent prendre une forme diffuse (les plus fréquentes) ou une forme nodulaire.
Les étiologies des calcifications métastatiques sont multiples et englobent l'insuffisance rénale chronique, l'hémodialyse, l'hypervitaminose D, l'hyperparathyroïdie primitive ou secondaire, les hypercalcémies paranéoplasiques ou accompagnant une destruction osseuse (métastases osseuses, myélome, lymphomes), le syndrome des buveurs de lait et d'alcalins, la sarcoïdose, la calciphylaxie.
Dans l'insuffisance rénale, l'hyperfixation touche principalement les poumons et le cœur.
Les calcifications péri-articulaires correspondent à des dépôts essentiellement péri-articulaires, symétriques, autour des grosses articulations (genoux, coudes, épaules).

c) Calcifications dystrophiques :

Les calcifications dystrophiques peuvent être localisées, après un traumatisme, d'une chirurgie, dans certaines tumeurs, lors d'une nécrose, d'une inflammation, de pathologies dégénératives, de lésions tissulaires induites par la chimiothérapie, dans l'amylose.
Elles peuvent être généralisées, comme dans les connectivites, la dermatomyosite, le lupus érythémateux diffus, la sclérose systémique, le CREST syndrome, les nécroses graisseuses sous-cutanées, les calcifications pancréatiques, le syndrome d'Ehlers-Danlos, le pseudoxanthoma elasticum, certaines maladies héréditaires (syndrome de Werner, syndrome de Rothmund-Thompson).

d) Amylose :

L'amylose peut être responsable d'une infiltration du squelette (amyloïdomes), du muscle cardiaque, des poumons (dépôts amyloïdes primitifs), du foie, des muscles squelettiques, des articulations (arthropathies amyloïdes), du revêtement cutané, de la thyroïde, de la langue, des glandes salivaires, du système nerveux périphérique, des intestins, de la rate, des reins (cf chapitre Cancérologie).

e) Myosite ossifiante circonscrite :

La myosite ossifiante circonscrite (ou primitive) est une affection bénigne, qui survient dans un contexte traumatique dans environ 50% des cas.
Elle touche l'adulte jeune de moins de 30 ans dans environ 75% des cas, le plus souvent de sexe masculin.
Elle est rare, voire exceptionnelle avant 10 ans.
Il s'agit d'un processus d'ossification hétérotopique des tissus mous, aboutissant à une ossification en anneau.
La myosite ossifiante se développe dans 80% des cas dans les muscles appendiculaires, et tout particulièrement la fesse, la cuisse (quadriceps), la région scapulaire et le bras (brachial antérieur).
Les autres localisations sont plus rares (muscles paravertébraux, piriforme, région cervicale, main, pied).

Sur le plan clinique, le patient signale l'apparition brutale d'une tuméfaction locale, de croissance rapide, associée à des douleurs et des signes inflammatoires locaux et/ou généraux (fébricule) et parfois des réveils nocturnes douloureux.
L'évolution naturelle se fait vers la guérison spontanée le plus souvent.
On distingue classiquement trois stades évolutifs :
- un stade aigu pseudo inflammatoire (4-5 semaines) ;
- un stade chronique (4-6 mois) ;
- un stade de régression (1-2 ans).
Le diagnostic est parfois difficile en début d'évolution, mais devient facile avec la maturation de la lésion.

La radiographie conventionnelle est parfois normale au stade précoce.
Elle montre entre la 2ème et la 12ème semaine, une masse calcifiée des tissus mous, dont le centre clair est rarement visible sur les clichés standards.
Les calcifications ont une croissance rapide.
Il existe un espace clair de démarcation avec l'os voisin et parfois une réaction périostée.
La masse diminue de taille avec la maturation.

L'échographie met en évidence en début d'évolution une masse hypoéchogène hétérogène.
Les calcifications sont objectivées de façon précoce.
On peut noter une ligne épaisse hyperéchogène, associée à une ombre acoustique autour d'un centre hypoéchogène.
Le doppler couleur objective une hypervascularisation lésionnelle.

La tomodensitométrie met en évidence le centre géographique de la lésion sous la forme d'une zone hypodense.
Elle visualise les calcifications plus précocement que la radiographie conventionnelle.
Elle montre un liseré clair séparant la lésion de l'os avoisinant et la répartition annulaire des calcifications, ainsi que la progression zonale centripète de l'ossification.

A l'IRM l'aspect est variable en fonction du stade.
Elle montre en début d'évolution une masse ovoïde, irrégulière, hypointense ou isointense en T1, hyperintense et un peu hétérogène en T2, se rehaussant en périphérie après injection de Gadolinium.
Progressivement apparaissent des zones hypointenses, curvilinéaires, en périphérie de la lésion, correspondant à des calcifications.
Il existe un œdème des tissus mous adjacents et parfois de l'os au contact.
A un stade avancé, on observe une coque ossifiée périphérique en hyposignal sur toutes les séquences et une moelle osseuse centrale de signal graisseux (aspect caractéristique).

La scintigraphie osseuse dynamique montre une hyperactivité très intense dans les parties molles aux trois temps de l'examen dès le début de l'évolution, avant même l'apparition des calcifications.
L'intensité de la fixation est variable en fonction du stade évolutif. Elle diminue avec la maturation de la lésion.
Le diagnostic différentiel peut faire discuter de multiples pathologies, parmi lesquelles un ostéosarcome des tissus mous, une infection, une pseudotumeur musculaire inflammatoire (fasciite nodulaire, fasciite proliférante, myosite focale…), une fracture avulsion, un cal fracturaire exubérant, une périostite post traumatique, un hématome, une mélorhéostose.

Les images TEMP/TDM associent les informations fonctionnelles et les anomalies TDM et sont souvent caractéristiques, passées les premières semaines d'évolution.

f) Calcinose tumorale :

La calcinose tumorale ou pseudotumorale ou maladie de Teutschlaender se présente sous la forme d'amas calciques, volontiers volumineux, localisés dans les tissus mous, notamment péri-articulaires.
Elle prédomine chez les patients noirs et s'observe essentiellement entre 10 et 30 ans.
Il existerait une transmission autosomique dominante d'expression variable.
On retrouve une histoire familiale dans 30 à 40% des cas.
Chez certains patients, elle pourrait être secondaire à une réabsorption du phosphate et à une formation de 1,25 dihydroxy- vitamine D anormale dans le tubule proximal du rein.
La calcinose pseudotumorale peut survenir chez des insuffisants rénaux non traités, mais les lésions sont plus fréquentes et plus volumineuses chez les patients hémodialysés ou transplantés.
Il y a quelques années, son étiologie principale était l'hyperparathyroïdie.
Actuellement, elle est d'origine iatrogène, par abus de chélateurs du phosphore, de carbonate de calcium, de calcitriol ou liée à une dialyse insuffisante.
Elle est parfois en rapport avec des traumatismes locaux.
Elle peut également être liée à une hypervitaminose D, un syndrome des buveurs de lait et d'alcalins ou une sarcoïdose.

Cliniquement, la calcinose se traduit par la présence d'une ou de plusieurs masses péri-articulaires, sensibles à la palpation, des myalgies et une limitation articulaire.
Les masses péri-articulaires sont parfois silencieuses et sont découvertes à l'examen clinique.

Sur le plan biologique, on retrouve souvent une augmentation du taux sérique du calcitriol et une hyperphosphorémie.
La calcémie et la parathormone sont dans les limites de la normale.

La radiologie conventionnelle montre des masses rondes ou ovalaires, de contours polylobulés. Les calcifications sont denses et amorphes.
On peut objectiver des zones radiotransparentes linéaires ou curvilignes correspondants aux septas fibreux.
Les calcifications se rencontrent en général autour des grosses articulations, comme les hanches, les épaules, les coudes, les genoux, mais également autour des poignets, des pieds et des mains.
Les masses sont multiples dans deux tiers des cas et siègent généralement à la face d'extension des articulations.
Elles ne sont pas habituelles au rachis.
On peut les objectiver rarement au niveau de l'articulation temporo-mandibulaire.
Ces amas calciques peuvent également être intrasynoviaux, intra-articulaires et intraligamentaires.
Les masses sont polylobulées, séparées par un tissu fibrovasculaire, et contiennent un liquide crémeux et jaunâtre, fait essentiellement de cristaux d'hydroxyapatite de calcium.

En TDM, on objective parfois des septas qui séparent des amas plus ou moins denses, contenant rarement des niveaux, témoignant de leur sédimentation au moins partielle.

En IRM, on note des masses hétérogènes, bien limitées, parfois en hyposignal sur toutes les séquences du fait des calcifications.
Les multiples logettes sont en en hyposignal T1 et parfois en hypersignal T2 hétérogène. Des érosions osseuses peuvent être objectivées à leur contact notamment lorsqu'elles se résorbent.

La scintigraphie osseuse montre une hyperfixation intense en regard des pseudotumeurs.
Elle peut montrer des lésions cliniquement silencieuses.
L'imagerie hybride précise les lésions en associant la réaction métaboliques aux images morphologiques TDM souvent caractéristiques.

g) Calcinose cutanée :

La calcinose cutanée est liée à des dépôts de calcium dans la peau, les tissus sous-cutanés et les tissus engainant les muscles.
On distingue la calcinose universelle, avec atteinte diffuse, rencontrée surtout dans la sclérodermie et la polymyosite et la calcinose circonscrite, avec atteinte localisée.
Les calcifications peuvent être dystrophiques, en liaison avec un traumatisme, une piqure d'insecte, une acné ou certaines tumeurs cutanées.
Les calcifications peuvent être métastatiques ou associées à une cause systémique de calcifications dystrophiques (survenue plus précoce, atteinte principalement des extrémités).
Ces lésions fixent souvent de façon intense le radiotraceur.
Leur morphologie et leur localisation sont bien analysées par la TEMP/TDM.

3°) Bibliographie :

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Date de création : 30/05/12
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