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Syndrome de Schnitzler
Plan :
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1°) Généralités : |
Il s'agit d'une affection rare, habituellement bénigne, évoluant sur un mode chronique.
La pathologie est probablement sous-diagnostiquée.
Le retard au diagnostic est habituel (5 ans en moyenne).
Environ 100 cas sont décrits, essentiellement en Europe.
La maladie est un peu plus fréquente chez l'homme que chez la femme (sex ratio 1,45), avec un âge moyen de 60 ans au moment du diagnostic.
Dans environ 10% des cas, elle peut évoluer vers une hémopathie lymphoproliférative.
2°) Clinique : |
- Atteinte musculo-squelettique (80% des patients).
Les douleurs osseuses touchent 70% des patients et prédominent sur le bassin, les fémurs et les tibias.
Elles peuvent toucher moins fréquemment les os longs, le rachis et les clavicules.
On rencontre également des myalgies, des arthralgies et des arthrites non érosives (59% des patients).
- Atteinte dermatologique :
Une urticaire chronique non prurigineuse est classique.
La dermatose est peu prurigineuse au début, mais le devient dans environ 30% des cas au cours de l'évolution.
Cette urticaire comporte essentiellement des papules érythémateuses, de 0,5 à 2-3 cm, parfois confluentes, touchant essentiellement le tronc et les membres et épargnant la tête et le cou.
L'évolution se fait par poussées successives, parfois entrecoupées d'un intervalle libre de 1 à 2 semaines.
De nouvelles lésions apparaissent tous les jours et durent moins de 24h.
Ces poussées seraient parfois favorisées par l'ingestion d'alcool.
L'histologie des lésions cutanées montre des infiltrats neutrophiliques, et rarement une vascularite leucocytoclasique.
- Fièvre intermittente dans 90% des cas avec des sueurs nocturnes et des pics à 40°c, souvent très bien tolérés.
L'hyperthermie est sans relation avec les manifestations cutanées.
Une perte de poids est parfois signalée.
- Adénomégalies de 2 à 3 cm, axillaires, inguinales, parfois cervicales, dans 50% des cas, à type d'hyperplasie réactionnelle.
- Hépatomégalie ou splénomégalie dans 1 cas sur 3.
- Il a été décrit une association avec une neuropathie périphérique, une hyperplasie nodulaire régénérative du foie ou une thrombose artérielle avec anticorps anti-phospholipides.
3°) Biologie : |
Un syndrome inflammatoire biologique, avec augmentation de la VS et de la CRP, est constant.
Une hyperleucocytose est retrouvée dans 90% des cas.
Une thrombocytose et une anémie inflammatoire sont présents dans 10% des cas.
On retrouve une gammapathie monoclonale IgM, sans signe de désordre lymphoprolifératif, le plus souvent à chaînes légères kappa (environ 90% des cas).
Le taux d'IgM est modéré et reste stable ou augmente progressivement.
On retrouve une protéinurie de Bence Jones dans plus de 40% des cas.
Ces anomalies peuvent faire discuter une maladie de Waldenström, mais dans cette dernière le taux d'IgM est très élevé.
Il a été signalé des formes de syndrome de Schnitzler à IgG et même à IgA.
La biopsie de moelle osseuse est normale dans 80% des cas.
Parfois, on retrouve une infiltration non spécifique, polyclonale, lymphocytaire et plasmocytaire.
4°) Examens radiologiques : |
- Atteinte du pelvis :
On observe des aires d'ostéosclérose touchant l'os iliaque, s'étendant progressivement.
En TDM, l'ostéosclérose apparaît mal définie.
Au niveau du bassin, on observe une modification du signal de type inflammatoire évoquant une ostéite primitive.
Les anomalies TDM et IRM ne sont pas strictement superposables aux foyers d'hyperfixation scintigraphiques.
Cette dissociation fait évoquer que les aires d'anomalies ostéoblastiques pourraient être distinctes des aires d'inflammation active.
5°) Scintigraphie osseuse : |
La scintigraphie osseuse met en évidence classiquement une hyperfixation qui correspond aux zones d'ostéosclérose.
Il existe une hyperfixation intense, verticale, bilatérale et souvent symétrique, qui se localise volontiers aux régions métaphyso-diaphysaires et épargne les épiphyses des os longs des membres inférieurs.
Elle prédomine en particulier sur les extrémités distales des fémurs et proximales des tibias.
Elle peut toucher plus rarement les membres supérieurs.
6°) Diagnostic : |
Le diagnostic repose sur les critères de Lipsker qui nécessitent la présence d'une gammapathie monoclonale IgM et d'un rash cutané chronique.
Ces deux anomalies doivent être associées à deux critères parmi les suivants :
- Une fièvre intermittente
- Des arthralgies ou des arthrites
- Des douleurs osseuses
- Des adénopathies
- Une hépatomégalie ou une splénomégalie
- Une VS augmentée
- Une hyperleucocytose
- Des anomalies radiologiques
La biopsie osseuse est habituellement normale ou montre parfois une inflammation non spécifique.
Le diagnostic différentiel doit faire discuter entre autres pathologies, la maladie de Still, le lupus érythémateux systémique, une vascularite urticarienne d'origine virale.
Les anomalies radiologiques doivent également évoquer tout particulièrement une ostéoarthropathie hypertrophique et une ostéite infectieuse en cas de présentation périphérique et un syndrome SAPHO, un POEMS syndrome, des métastases osseuses ostéoblastiques (prostate) si la présentation est axiale.
7°) Evolution : |
Il n'y a pas de rémission spontanée.
L'Anakinra (forme recombinante de L'IL1-RA) semble un traitement prometteur.
Il peut survenir des désordres lymphoprolifératifs dans environ 10 à 15% des cas au bout de 10-20 ans, le plus souvent à type de lymphome, de myélome, de maladie de Waldenström ou parfois d'amylose AA.
8°) Bibliographie : |
- Bertrand A, Feydy A, Belmatoug N, Fantin B
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- Colavolpe C, Paycha F, Ene N, Benyamine A, Serratrice J, Le Corroler T, Puech JB, Guedj E, Weiller PJ, Mundler O
A propos d'un cas de maladie de Schnitzler : rappel nosologique et discussiondiagnostique des hyperfixations scintigraphiques du squelette jambier
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- Cotten A, Leleu X, Facon T
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- Goupille P, Pizzuti P, Diot E, Jattiot F, Guilmot JL, Valat JP
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- Soubrier M
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