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Amylose de type AL
Plan :
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1°) Généralités : |
L'amylose immunoglobulinique primitive type AL est une affection systémique grave qui associe une maladie plasmocytaire peu évolutive et de multiples atteintes viscérales liées au dépôt de substance amyloïde.
Il s'agit d'une dyscrasie plasmocytaire rare, dans laquelle les dépôts amyloïdes sont à l'avant plan par rapport à l'infiltration plasmocytaire.
L'amylose AL est plus fréquente que l'amylose AA.
Son incidence est estimée entre 5,1 et 12,8 cas par million aux USA.
Dans 80 à 90% des cas d'amylose AL un composant monoclonal sérique et/ou urinaire est identifiable.
Lorsque cette immunoglobuline remplit tous les critères d'une immunoglobuline monoclonale bénigne, on parle d'amylose primitive (plus de 80% des amyloses AL).
Dans 10 à 20% des cas, elle est associée à un myélome et dans 1% des cas elle est associée à une maladie de Waldenström.
Dans le myélome, l'amylose peut précéder la survenue du myélome ou survenir après sa découverte.
2°) Clinique : |
Dans l'amylose AL, la clinique est très polymorphe.
Elle est liée à une accumulation de substance amyloïde, composée de produits de protéolyse des chaînes légères dans le tissu synovial, les différentes structures intra-articulaires, les régions tendineuses et péri-tendineuses et les tissus de voisinage.
L'arthropathie amyloïde touche l'homme plus que la femme, à un âge moyen de 60 ans.
Le diagnostic de l'atteinte articulaire peut être concomitant de la dyscrasie plasmocytaire ou posé quelques mois plus tard.
- Le tableau le plus fréquent (70-80% des cas) est celui d'une polyarthrite bilatérale, symétrique, d'installation progressive, simulant une polyarthrite rhumatoïde.
Elle est responsable d'une limitation douloureuse des mouvements articulaires, affectant surtout les épaules, les poignets, les métacarpophalangiennes, les interphalangiennes proximales et les genoux.
Elle s'accompagne d'un gonflement articulaire, parfois d'aspect pseudotumoral, en particulier sur la face dorsale des mains et des poignets.
Aux épaules, ce gonflement peut donner le signe de l'épaulette dans un tiers des cas (quasi pathognomonique).
Cette polyarthrite s'accompagne de nodules cutanés dans 50% de cas, symétriques, de taille et de nombre variable, fermes, non douloureux et non inflammatoires, localisés essentiellement sur les régions olécranienne, les poignets, les doigts, les creux poplités et les régions inguinales, constitués de dépôts amyloïdes.
Les formes oligoarticulaires ou monoarticulaires inaugurales sont plus rares (10% chacune).
Un syndrome du canal carpien typique est classique (24-65% des cas), inaugural dans 5% des cas et concomitant des signes articulaires dans 25% des cas.
Son caractère bilatéral est très évocateur de l'affection (97% des cas).
Il est lié à des dépôts amyloïdes dans les gaines des tendons fléchisseurs des doigts au niveau du canal carpien.
L'atteinte des tendons fléchisseurs des doigts est parfois responsable d'une attitude en flexion invalidante.
- Rarement, l'arthropathie amyloïde peut prendre un aspect de pseudopolyarthrite rhizomélique, voire de maladie de Horton.
Les patients peuvent décrire une claudication de la mâchoire (10% des cas), des douleurs de la ceinture scapulaire, des céphalées, des douleurs temporales, des douleurs du cuir chevelu ou des troubles visuels.
La biopsie de l'artère temporale montre l'absence de signes inflammatoires et retrouve une amylose.
Il s'agit plus souvent de patients âgés (70 ans en moyenne).
La VS est augmentée et une immunoglobuline monoclonale est présente dans tous les cas.
En fonction de l'importance des dépôts amyloïdes et de la prolifération plasmocytaire, on peut observer tous les intermédiaires entre une prolifération plasmocytaire prédominante (plasmocytome), associée à quelques dépôts d'amylose AL et une amylose localisée (amyloïdome) sans anomalie plasmocytaire tumorale.
- Des infarctus osseux et des ostéonécroses épiphysaires par occlusion des vaisseaux par l'amylose péri-vasculaire peuvent survenir.
- Les amyloïdomes peuvent avoir une localisation extra-osseuse.
Richter et Coll ont rapporté un cas de tumeurs amyloïdes localisées à une côte, un sein et à un poumon dans un myélome multiple non sécrétant.
L'amyloïdome vertébral est deux fois plus fréquent chez l'homme que chez la femme, à un âge moyen de 57 ans.
Par ordre de fréquence décroissante, l'atteinte est surtout thoracique (environ 50% des cas), puis cervicale, lombaire et enfin sacrée.
Les douleurs sont généralement révélatrices.
Les tumeurs sont souvent associées à des troubles neurologiques.
A l'étage thoracique, deux tiers des patients présentent une paraparésie et exceptionnellement une paraplégie.
A l'étage lombaire et sacré, il peut survenir des radiculalgies et exceptionnellement un syndrome de la queue de cheval.
A l'étage cervical, l'atteinte neurologique est constante.
Le retard du diagnostic est habituel (6 mois environ) et la tumeur est volumineuse.
Le pronostic de l'amyloïdome vertébral est excellent après chirurgie, sauf en cas d'évolution vers un myélome ou une amylose systémique.
La récidive locale est exceptionnelle.
3°) Biologie : |
Dans l'amylose AL, le plus souvent, un composant monoclonal sérique et/ou urinaire est mis en évidence.
Dans l'arthropathie amyloïde le liquide articulaire est citrin et parfois hémorragique (ponction à l'épaule et au genou essentiellement).
Il contient des cellules mononucléées (environ 1700 cellules/mm3), exceptionnellement des polynucléaires neutrophiles.
Une immunoglobuline monoclonale ou des chaînes légères sont fréquemment retrouvées.
On peut mettre en évidence la substance amyloïde par coloration spécifique du culot de centrifugation.
Le diagnostic peut être fait par la biopsie des nodules ou des parties molles péri-articulaires, voire du cartilage ou de l'os sous-chondral.
La biopsie des glandes salivaires accessoires ou d'un autre site peut être utile au diagnostic (biopsie rectale, biopsie gastrique).
L'examen anatomopathologique des amyloïdomes est souvent le seul moyen d'en faire le diagnostic.
4°) Examens radiologiques : |
Les amyloïdomes se présentent sous la forme de lésions lytiques, volontiers associées à des calcifications de type chondroïde.
L'aspect morphologique est souvent non spécifique.
5°) Scintigraphie osseuse : |
Dans les arthropathies amyloïdes, on retrouve une hyperfixation d'aspect non spécifique des articulations atteintes.
On peut de plus mettre en évidence une fixation extra-squelettique associée qui a une importante valeur d'orientation diagnostique.
On décrit en particulier cette fixation sur le revêtement cutané, les muscles, la thyroïde, la langue, les glandes salivaires, le système nerveux périphérique, les intestins, le foie, la rate, les reins.
Une fixation myocardique est parfois mise en évidence dans les différentes formes d'amylose, mais la scintigraphie osseuse est nettement moins performante que l'échocardiographie pour montrer l'atteinte cardiaque.
Les amyloïdomes présentent une hyperfixation franche d'aspect non spécifique.
Une étude TEMP/TDM peut préciser la lésion osseuse et les fixations extra-squelettiques, mais ne permet pas le diagnostic étiologique.
La scintigraphie osseuse n'est pas recommandée dans le diagnostic de l'amylose.
La sensibilité de l'examen est bonne, mais la spécificité est médiocre.
La scintigraphie osseuse dynamique peut cependant fournir des renseignements intéressants, en particulier en montrant la distribution et l'extension de plusieurs types d'amylose, parmi lesquelles l'amylose systémique AA et l'amylose systémique AL.
Enfin, les anomalies scintigraphiques peuvent conduire à la découverte d'une amylose non connue.
6°) Diagnostic : |
Le diagnostic différentiel de l'arthropathie amyloïde doit faire discuter les rhumatismes inflammatoires chroniques et les connectivites.
Les polyarthrites évoquant une polyarthrite rhumatoïde ont une présentation peu évocatrice d'un rhumatisme inflammatoire.
En effet, les douleurs sont le plus souvent mécaniques, le dérouillage matinal est bref ou absent, le gonflement articulaire n'est pas inflammatoire.
Il existe plutôt une infiltration des tissus péri-articulaires.
La pathologie prédomine chez l'homme alors que la polyarthrite rhumatoïde touche plus fréquemment la femme.
Cette pathologie répond mal aux corticoïdes per os ou en infiltration, contrairement à la polyarthrite rhumatoïde.
Sur le plan biologique, le syndrome inflammatoire est absent ou discret et les examens immunologiques sont négatifs (facteur rhumatoïde).
Sur le plan radiologique, les arthropathies sont très rarement destructrices, contrairement à celles de la polyarthrite rhumatoïde.
Il peut exister des signes associés (macroglossie, hépatomégalie, neuropathie périphérique).
Le diagnostic est obtenu par la biopsie des tissus articulaires et péri-articulaires pathologiques.
La biopsie des glandes salivaires accessoires est parfois utile.
La biopsie cutanée est réalisée en présence de lésions.
A l'examen, on observe des dépôts extra-cellulaires donnant un aspect de biréfringence jaune-vert en lumière polarisée à la coloration rouge congo.
Le diagnostic différentiel des amyloïdomes conduit à discuter les tumeurs osseuses, et en particulier les chondrosarcomes.
Le diagnostic repose sur la biopsie osseuse.
7°) Bibliographie : |
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