Hypertension artérielle rénovasculaire et scintigraphie rénale sensibilisée par le CaptoprilLes examens complémentaires prescrits dans le bilan d'une HTRVLa scintigraphie rénale sensibilisée par le CaptoprilLa stratégie d'explorationLes limites de le scintigraphie rénaleConclusion
Dans les pays industrialisés, l'hypertension artérielle (HTA)
touche environ 10 % de la population. Elle est le plus souvent essentielle.
L'HTA rénovasculaire (HTRV), bien que peu fréquente (moins de
1 % de toutes les HTA), représente une étiologie potentiellement
curable.
De multiples méthodes d'exploration, radiologiques ou biologiques, peuvent entrer dans le bilan de l'HTRV. Elles se regroupent en trois catégories dont nous allons successivement discuter. 1°) Les méthodes permettant de visualiser la sténose rénale :* L'artériographie est la méthode de référence. Il s'agit d'une technique invasive et onéreuse, qui peut être responsable de complications vasculaires ou rénales. Les complications majeures représentent 1,2 % (emboles, thromboses, toxicité du produit de contraste). Les décès sont rares (0,l %). Une sténose est dite significative si elle réduit d'au moins 50 % le diamètre luminal (ou 70 % le calibre de l'artère). Il n'existe pas actuellement de méthode de quantification objective. Enfin et surtout, la relation entre réduction du calibre artériel et degré d'ischémie rénale est faible.* L'angiographie numérisée par voie veineuse (DIVA) est moins invasive et moins onéreuse, mais elle pèche par une résolution plus faible, responsable d'artéfacts (10 % d'examens interprétables). Sa sensibilité est de l'ordre de 80 %. Les faux négatifs sont fréquents en cas de fibrodysplasie (jusqu'à 50 %). * L'Echographie-Doppler est une technique non invasive et peu onéreuse, qui demande un minimum d'une heure d'examen pour un opérateur expérimenté. Il s'agit d'un examen très opérateur-dépendant. L'introduction du doppler couleur ne semble pas améliorer sa sensibilité qui varie selon les études entre 75 et 100 %. Sa spécificité varie entre 73 et 100 %. * L'intérêt de l'imagerie par résonance magnétique nucléaire est encore en cours d'évaluation. Elle réalise une angiographie sans injection de produit de contraste. Elle ne semble fiable que pour le segment artériel proximal. L'examen dure environ 40 mn. * Le scanner spiralé semble prometteur, mais des travaux complémentaires sont nécessaires pour l'évaluer de façon satisfaisante. 2°) Les méthodes permettant de mettre en évidence l'hyperactivité du système rénine-angiotensine :Elles sont simples et peu coûteuses, mais leur intérêt clinique est loin d'être prouvé.* L'activité rénine plasmatique (ARP) ou la concentration plasmatique de rénine active n'ont que peu d'intérêt. Leur sensibilité et leur spécificité sont faibles (respectivement 57 % et 66 %). * Le test au Captopril permet de mesurer l'augmentation de l'ARP après une prise unique de Captopril. Sa sensibilité et sa spécificité sont très variablement appréciées selon les études (respectivement 34 à 100 % et 72 à 95 %). 3°) Les méthodes permettant de localiser de manière directe ou indirecte l'asymétrie de sécrétion de rénine :* L'urographie intraveineuse avec clichés précoces minutés n'est plus indiquée de nos jours en raison de ses faibles performances diagnostiques (sensibilité et spécificité voisines de 60 %).* Le cathétérisme étagé des veines rénales avec mesure de l'ARP (ou de la rénine) permet de mettre en évidence l'asymétrie de production de rénine. Il est abandonné au profit des méthodes isotopiques par certaines équipes en raison de ses plus faibles performances diagnostiques (sensibilité 80 %; spécificité 62 %; valeur prédictive positive 92 %; valeur prédictive négative 35 %). 4°) Les méthodes isotopiques seront détaillées dans
le chapitre suivant.
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II - La scintigraphie rénale sensibilisée par le Captopril : |
Il s'agit d'un examen non invasif, fiable et précis, faisant appel à des radio-isotopes, très peu irradiant, mais relativement onéreux.
Certains signes doivent faire évoquer une HTRV :
- Début brutal d'une hypertension avant 20 ans ou après 50 ans ;
- Aggravation brutale d'une HTA préalablement contrôlée ;
- HTA réfractaire chez un patient compliant ;
- HTA maligne ou accélérée ;
- HTA chez un fumeur porteur de sténoses artérielles dans d'autres territoires ;
- Présence d'un souffle systolo-diastolique abdominal ;
- HTA avec insuffisance rénale inexpliquée progressive ou insuffisance rénale réversible induite par un inhibiteur de l'enzyme de conversion ou tout autre traitement anti-hypertenseur ;
- Multiples épisodes d'OAP chez un patient hypertendu insuffisant rénal.
Aux USA un groupe d'experts a déterminé une gradation du néphrogramme
(Consensus Commitee of the Working Party on Diagnostic Criteria for Renovascular
Hypertension). Cette gradation permet de définir la probabilité
d'HTRV en fonction du néphrogramme avant et après Captopril et
surtout en fonction des variations entre ces deux néphrogrammes.
A partir de l'analyse du néphrogramme on détermine :
- le grade 0 : normal,
- le grade 1 : retard modéré du pic (T max entre 6 et 11 mn),
- le grade 2 : retard net du pic (T max > 11 mn), avec un grade 2 A s'il persiste
une phase excrétoire et un grade 2 B s'il n'existe plus de phase excrétoire.
La probabilité d'une HTRV est d'autant plus forte que le grade du néphrogramme
est élevé et qu'il existe une plus forte augmentation de grade
entre l'examen avant et l'examen après Captopril.
III - La stratégie d'exploration : |
La scintigraphie rénale sensibilisée par le Captopril peut être
utilisée de deux façons dans le bilan des HTA suspectées
d'être d'origine rénovasculaire :
- soit en screening chez tous les patients suspects. Il faut, dès
lors, utiliser le protocole qui a la meilleure sensibilité au détriment
de la spécificité. On réalisera donc uniquement une scintigraphie
rénale post-Captopril (sensibilité 92 % ; spécificité
65 %). Tous les patients dont le test est positif sont alors explorés
par artériographie.
- soit pour prouver l'imputabilité d'une sténose rénale
connue dans l'HTA et donc le caractère réversible de cette
HTA après revascularisation. On utilisera alors le protocole qui a la
meilleure spécificité au détriment de la sensibilité.
Pour cela on réalisera une scintigraphie avant et après Captopril
et on ne tiendra compte que des variations entre ces deux examens (sensibilité
76 % ; spécificité 90 %). Tous les patients dont le test est positif
seront traités revascularisés. La survenue de variations avant
et après Captopril a une valeur prédictive positive de 97 % et
une valeur prédictive négative de 72 % pour prédire la
guérison ou au moins l'amélioration d'une HTRV.
IV - Les limites de le scintigraphie rénale : |
Elles sont au nombre de trois : les petits reins, l'insuffisance rénale
et les sténoses bilatérales.
- Le problème des petits reins :
Un rein diminué de taille et/ou de fonction est responsable d'un faux
positif à la scintigraphie rénale réalisée avec
ou sans Captopril. Il ne faut donc tenir compte que des variations avant et
après Captopril. Une absence de variation plaide, s'il existe une sténose
rénale, pour une HTRV non réversible. Une revascularisation peut
cependant être envisagée pour sauver le parenchyme rénal
encore fonctionnel. L'évaluation du parenchyme rénal encore fonctionnel
se fait au moyen d'une scintigraphie rénale au DMSA.
- Le problème des sténoses artérielles rénales
bilatérales :
Les sténoses bilatérales retentissent de façon bilatérale
sur la filtration glomérulaire. Ce retentissement est en général
asymétrique. On observe donc un effondrement bilatéral (et souvent
asymétrique) des courbes de captation et des index. Très souvent
cependant un effondrement bilatéral des courbes correspond à un
faux positif lié à la prise de diurétiques et/ou d'un régime
désodé.
- Le problème de l'insuffisance rénale :
L'altération bilatérale de la filtration glomérulaire rend
impossible l'utilisation d'un traceur glomérulaire comme le DTPA-Tc 99m
(dès 200 µM/1 de créatininémie). Le MAG 3-Tc 99m doit
alors être utilisé. Dans cette indication sa valeur diagnostique
reste encore en évaluation. Là encore seules les variations entre
le test avant et après Captopril peuvent être retenues. L'insuffisance
rénale diminue très nettement la sensibilité du test au
Captopril. En cas d'insuffisance rénale, la revascularisation peut également
être retenue pour sauver le parenchyme encore fonctionnel, menacé
par des sténoses rénales.
V - Conclusion : |
La scintigraphie rénale sensibilisée par le Captopril est un
examen non invasif et peu irradiant, mais relativement onéreux. Elle
nécessite un tri clinique préalable, de façon à
sélectionner les patients à risque d'HTRV et l'arrêt des
thérapeutiques anti-hypertensives (diurétiques et inhibiteurs
de l'enzyme de conversion).
Lorsque ces conditions sont respectées, la scintigraphie rénale
sensibilisée par le Captopril est l'examen non invasif qui a la meilleure
sensibilité et la meilleure spécificité (DIVA comprise)
dans le bilan des HTRV. Elle permet de plus de sélectionner les patients
qui répondront au traitement chirurgical.
Cet examen qui reste encore confidentiel, mérite de voir dans l'avenir
ses indications augmenter, car il permet la meilleure stratégie d'exploration
des HTRV.
- Granier P. - Hypertension artérielle rénovasculaire
et scintigraphie rénale sensibilisée par le Captopril - Cardiologie
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- Maisey M.N., Britton K.E., Gilday D.L. - Clinical Nuclear Medicine
- Chapman and Hall Medical 1991.
- Mettler F. A., Guiberteau M. J. - Essentials of Nuclear Medicine Imaging
- W. B. Saunders Compagny 1991
- Prigent A. et coll. - Eur. J. Nucl. Med. 1993; 20 : 625-644